Le moment est venu d’agir : un plan d’action national pour lutter contre la violence faite aux filles et aux femmes autochtones

À titre d’ombudsman fédérale des victimes d’actes criminels, je veux exprimer mon appui aux nombreuses organisations locales de femmes autochtones et aux groupes de défense de leurs intérêts qui demandent au gouvernement fédéral de s’attaquer à la crise nationale de la violence contre les femmes et les filles inuites, métisses et des Premières Nations. Cinq années se sont écoulées depuis l’annonce de la mise sur pied de l’enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Cela fait près d’un an et demi qu’ont été publiés le rapport final et les appels à la justice. Le 4 octobre, des vigiles des Sœurs par l’esprit ont été organisées dans tout le Canada pour honorer les femmes et les filles chéries victimes de violence.

Nous ne devons pas laisser la pandémie de COVID-19 retarder davantage la réponse du gouvernement à cette pandémie de violence de longue date. Depuis le mois de mars, nous avons constaté une augmentation du racisme, de la violence entre partenaires intimes, du nombre de sans-abri et de la traite des êtres humains, qui touchent les femmes et les filles autochtones plus que tout autre groupe. Nous pouvons sauver des vies et des traumatismes si nous mettons rapidement en œuvre un plan d’action national pour lutter contre la violence à l’égard des femmes et des filles autochtones.

Au moment où j’écris ces lignes, les femmes et les filles autochtones continuent de vivre dans la peur de la violence. Elles se demandent si elles ne seront pas les prochaines à disparaître. Beaucoup continuent de disparaître de leurs communautés et certaines sont assassinées. En fait, nous savons que les femmes autochtones courent au moins six fois plus de risques d’être assassinées que les femmes non autochtones au Canada. Les familles touchées par cette crise nationale continuent à ne bénéficier que de peu de soutien pour les aider à faire face à leur deuil. Il existe trop peu de programmes qui offrent un soutien culturel pour permettre leur guérison. De nombreuses familles de femmes et de filles autochtones disparues ou assassinées continuent de chercher des réponses sur ce qui est arrivé à leurs proches. C’est injuste et ce n’est pas la façon dont les victimes de crimes devraient être traitées au Canada.

Les chercheurs et les défenseurs des droits des femmes ont constaté que l’intersection des défis sociaux et économiques contribue à l’exploitation des femmes autochtones et accroît leur vulnérabilité à la violence. Le racisme et la discrimination systémiques sont présents dans de nombreuses institutions, notamment celles touchant les soins de santé, l’emploi, la protection de l’enfance, l’éducation, la sécurité alimentaire, les sans-abri et le logement, le maintien de l’ordre, la justice et les services sociaux. Nous devons accorder la priorité à la sécurité des femmes et des filles autochtones lorsqu’elles doivent naviguer dans les systèmes et explorer les services, ainsi qu’à leur sécurité à la maison, au sein de leur famille, dans leur communauté et dans les espaces publics.

Je suis d’accord avec les experts qui ont déclaré que les femmes autochtones savent mieux que quiconque quelles solutions seront efficaces et comment les mettre en œuvre de manière significative. Leurs connaissances, leur expérience et leur expertise doivent être intégrées dans le plan d’action national. Il est temps de donner accès à des services et des programmes sociaux financés de manière durable, adaptés aux traumatismes et fondés sur la culture, dirigés par des femmes autochtones, pour répondre à leurs besoins.

Si nous y parvenons, nous progresserons vers la réconciliation et améliorerons la sécurité tout en nous attaquant aux causes systémiques de la violence, qui ont entraîné la disparition et l’assassinat de beaucoup trop de femmes et de filles autochtones. Nous ne pouvons plus nous contenter de parler de ce que nous devrions faire. Nous devons agir MAINTENANT, car des vies autochtones sont en danger chaque jour.

 

Heidi Illingworth
Ombudsman fédérale des victimes d’actes criminels