Différences dans l’application des lois et des pratiques en matière de justice pénale relativement aux problèmes qu’éprouvent les victimes de violence privée par rapport aux victimes de violence publique
Hannah Scott, Institut universitaire de technologie de l’Ontario
4 mai 2021
Hannah Scott, Ph.D., professeure
Faculté des sciences sociales et humaines
Institut universitaire de technologie de l’Ontario
2000, rue Simcoe Nord (campus du centre-ville, Bordessa Hall)
Oshawa (Ontario) Canada L1G 0C5
Courriel : hannah.scott@ontariotechu.ca
Téléphone : 905-721-8668 X2653
Résumé
Le présent document examine les aspects de la violence publique et privée, soulignant la préférence historique pour les préoccupations relatives à la sécurité publique et la minimisation de la menace de violence pour les victimes dans les espaces privés. Les crimes de violence privée présentent des caractéristiques sexospécifiques, touchant surtout les femmes, les enfants et les personnes âgées, qui vivent souvent avec des délinquants. Par conséquent, les victimes de crimes commis dans des milieux privés font face à plusieurs problèmes bien documentés en matière de signalement, compte tenu de la proximité relationnelle et sociale du délinquant. Dans le présent document, on fait valoir que les victimes de violence privée sont mal servies par le système de justice pénale. Des données probantes montrent que plus du quart à trois appels de service sur dix concernent une forme quelconque de violence privée, ce qui représente une proportion importante des appels pour des crimes violents. Il est également bien connu que des appels liés à des crimes privés sont souvent répétés aux mêmes endroits. Les appels répétés à la police constituent un facteur de risque important lié à la vulnérabilité à l’homicide en milieu privé.
Le présent document remet en question l’hypothèse voulant que la violence privée ne soit pas associée à un risque important pour le public et que les facteurs de risque pour la sécurité privée soient moins graves ou considérés comme présentant un risque moins élevé que les menaces à la sécurité publique. En tant que partenaires du système de justice pénale qui aident à déterminer et à fournir des éléments de preuve pour diverses autres personnes, les victimes doivent recevoir du soutien pour participer pleinement au processus. L’élaboration d’une politique qui reconnaît les comportements des récidivistes qui ciblent précisément les victimes en milieu privé, en les préparant souvent à s’adapter au danger au moyen de méthodes de contrôle coercitif, constitue un outil législatif qui peut être utile. Par conséquent, l’application de règles semblables aux victimes de violence publique et privée dans ces cas, comme la désignation des délinquants qui commettent à répétition des actes de violence privée comme des récidivistes, peut aider à éliminer certaines des inégalités législatives qui existent entre les types de violence.
Remerciements
La rédaction du présent document a été rendue possible grâce à une subvention du Bureau de l’ombudsman fédéral des victimes d’actes criminels et à l’aide reçue de la part de mon adjointe de recherche, Samantha Chopik, qui a travaillé avec diligence pour fournir les données brutes.
Introduction
Les victimes d’actes criminels demeurent l’une des parties les plus essentielles du processus de justice pénale en vue de l’identification, de l’arrestation, de l’extraction du domicile et parfois même de la réhabilitation des délinquants. Elles détiennent souvent les clés qui ouvrent les portes du système de justice pénale. Les victimes sont les premières personnes à appeler les policiers, elles présentent à ces derniers leur expérience de victimisation comme preuve, elles doivent défendre cette expérience auprès de la police, des avocats et d’autres membres du système de justice pénale et sont souvent exposées à des interrogatoires répétés par de nombreuses autres personnes. On leur demande de témoigner au besoin pour aider le système à obtenir justice et elles peuvent présenter une déclaration de la victime au moment des enquêtes sur le cautionnement et des audiences de détermination de la peine et de libération conditionnelle. Elles sont des partenaires à part entière du système de justice pénale, sans lesquels le système devrait ralentir considérablement ou interrompre la détection et l’arrestation des criminels et leur extraction du domicile. Pourtant, malgré le besoin essentiel que la victime participe au système de justice pénale, on s’attend à ce qu’elle reçoive un soutien minimal. Lorsque la violence se produit dans des sphères privées, l’expérience de la victime est aggravée, ce qui rend cette dernière plus vulnérable, puisqu’elle souffre souvent de traumatismes complexes (Dokkedahl, Kristensen, Murphy et Elklit, 2021; Gilbar et Ford, 2020; Naughton, O’Donnell et Muldoon, 2015; Smith, Patton, McLeigh et Spalding, 2016; Wamser-Nanney et Vandenberg, 2013), qu’elle est moins en mesure de signaler les crimes commis contre elle (Conroy, Burczycka et Savage, 2019) et qu’elle reçoit moins de soutien pour obtenir justice et être en sécurité (Meyer, 2011), comparativement aux victimes de violence publique.
Les systèmes de justice pénale s’appuient fortement sur des « éléments de preuve » manifestes, prenant souvent la forme de témoignages, de blessures physiques et de déclarations de témoins concernant les préjudices subis. Cela ne tient pas compte de ce que la plupart des victimes de violence privée vivent. Dans les cas de violence privée, les récidivistes (c.‑à‑d. les parents, partenaires, enfants, autres membres de la famille, etc., violents) cherchent souvent à préparer les victimes (Dietz, 2008) par l’isolement, la violence psychologique, le contrôle, la coercition (Gill et Aspinall, 2020; Start, 2007) et d’autres formes discrètes de violence, pour continuer d’avoir accès à un petit nombre de victimes. Les tactiques discrètes sont moins risquées pour les délinquants, car elles sont presque indétectables dans le système de lois actuel, qui repose presque exclusivement sur des éléments de preuve manifestes.
Les faits énoncés dans le présent document ne sont pas nouveaux, en ce sens qu’ils font ressortir à juste titre plusieurs tendances en matière de violence privée qui sont relativement bien connues. Les victimes de violence cherchent à obtenir protection et justice au sein d’un système initialement conçu pour servir les intérêts patriarcaux traditionnels des victimes, le plus souvent des hommes, qui sont visées dans des espaces publics. Les victimes de violence en milieu privé sont surtout des femmes et des enfants et sont moins susceptibles d’appeler la police que les autres victimes de violence pour diverses raisons qui sont bien documentées (Finkelhor, Wolak et Berliner, 2001; Ha et Colle, 2013; Voce et Boxall, 2018). Lorsque les victimes appellent la police, cela survient le plus souvent après une période assez longue de victimisation avec violence non signalée et, par conséquent, elles sont mal servies par notre système de justice pénale. Le présent document examine les notions actuelles de violence publique et de violence privée et la façon dont le système de justice pénale considère les formes privées de violence (p. ex. la violence familiale comme la maltraitance des enfants, la violence entre partenaires intimes et la violence à l’égard des aînés) comme des incidents isolés, plutôt que comme des actes de violence répétés contre un petit groupe de victimes. Cette exposition répétée à la violence peut ne pas être reconnue comme étant aussi néfaste que d’autres formes publiques de récidive.
Dans le présent document, on cherche également à reformuler la terminologie du système de justice pénale en utilisant les concepts de violence publique et de violence privée, plutôt que des termes comme « violence familiale », pour assurer une neutralité de genre dans les termes normalisés. Plus précisément, on soutient que la « violence familiale » correspond plus exactement à de la « violence privée », car elle est à la fois subie en milieu privé et de nature privée. Dans le présent document, on cherche également à reformuler des termes comme « antécédents de violence » pour parler d’incidents de violence privée en termes descriptifs plus exacts, comme les actes criminels commis par des « récidivistes », termes qui sont plus souvent utilisés à l’extérieur des sphères privées au moment de traiter des appels de service fréquents à des endroits publics. On réexaminera également l’application de la notion de « risque pour le public » dans le cadre de la détermination de la peine et d’autres documents d’évaluation du risque et reformulera la façon dont le système de justice pénale perçoit le « risque de récidive ». Le lecteur sera appelé à réfléchir à ce que signifie l’évaluation du risque pour le public dans les cas de violence privée. On tentera dans le présent document de recadrer les discussions afin de tenir compte de la gravité de la violence privée, qui est depuis toujours minimisée et considérée comme un préjudice public. Enfin, des recommandations concernant les méthodes efficaces pour cerner et régler les problèmes de violence privée au Canada et y répondre seront présentées. On espère que ce nouvel examen et cette reformulation des idées continueront d’améliorer le soutien offert, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du système de justice pénale, aux victimes de violence privée.
Pratique historique
Terry (2016) soutient que la façon dont les hommes et les femmes « font le genre » est « […] typiquement un produit de l’histoire, de la culture et de l’idéologie sexuelle actuelle » (Terry, 2016, p. 74). Le pouvoir patriarcal restreint les rôles des hommes et des femmes, entraînant des divisions structurelles qui, à leur tour, continuent d’établir des structures de pouvoir social inégales et hiérarchisées. Cette situation est amplifiée ou aggravée lorsque d’autres identités intersectionnelles, comme la race et la sexualité, sont prises en compte dans les hiérarchies sociales. Cette auteure soutient effectivement que ces processus sexospécifiques servent à perpétuer et à renforcer les constructions existantes du pouvoir patriarcal. À titre d’exemple, ce préjugé masculin se perpétue dans l’utilisation quotidienne de titres et de noms pour les hommes, les femmes et les enfants, en particulier pour les femmes et les filles. Spender (1980) fait remarquer que le terme « Mister » (Mr.), en anglais, est dérivé du titre « Master » (maître). Les femmes mariées étaient désignées sous le titre de « Mistress » (Mrs.) à l’intérieur de la maison, devaient traditionnellement changer leur nom de famille pour celui du « maître » et, en public, devaient être abordées par le nom de ce dernier (p. ex. Mrs. John Henry). Les femmes qui n’étaient pas mariées se voyaient attribuer le terme de « Miss », qui les identifiait comme étant prêtes au mariage, tandis que les hommes célibataires conservaient leur titre de « Master » tout au long de leur vie, peu importe leur état matrimonial ou leur âge. Bien qu’un plus grand nombre de femmes optent pour le titre de « Ms. » afin de ne pas révéler leur état matrimonial, le titre est un dérivé de « Mrs. » ou de « Mistress » et demeure ainsi une désignation qui donne à penser que les femmes sont non pas des « maîtres », mais quelque chose d’« autre ». Cet effort continu pour contrer cette influence patriarcale historique se reflète également dans les efforts déployés par les systèmes de common law pour lutter contre la victimisation des personnes victimes de violence privée, qui continuent d’être principalement des femmes et des enfants.
Par exemple, les hommes, par le passé et dans une moindre mesure à l’heure actuelle, sont plus susceptibles d’occuper des postes publics à l’extérieur du foyer. L’engagement public des hommes est renforcé dans la common law, initialement établie par des dirigeants pour mettre en place un système juridique largement préoccupé par les actes criminels commis par des hommes dans l’espace public. Par conséquent, la protection des hommes contre d’autres hommes, en public, est devenue le fondement du système juridique. Par le passé, en vertu de la common law, les hommes étaient tous égaux devant la loi et on supposait qu’ils avaient le même statut, à une époque où les femmes n’étaient pas en mesure de participer à la vie publique. Comme l’égalité des droits des femmes a été intégrée dans divers documents de nombreux pays sous le régime de la common law, les femmes ont d’abord été incluses dans le terme « hommes » et ont donc obtenu les mêmes droits. Les femmes étaient essentiellement traitées comme des hommes en vertu de la loi, même si elles vivaient des expériences différentes, surtout dans le contexte du patriarcat. L’application continue des lois, fondée sur une vision patriarcale du monde, a entraîné un décalage permanent dans la façon de traiter la victimisation des femmes, des enfants et des personnes âgées, qui sont en grande partie victimisés dans des sphères privées par des délinquants de sexe masculin qu’ils connaissent bien (Conroy, Burczycka et Savage, 2019).
Délimitation de l’espace dans les systèmes sociaux dominés par les hommes
Traditionnellement, dans les systèmes dominés par les hommes, le foyer est présenté comme un lieu de repos et de sécurité. Les hommes qui revenaient du travail, à l’extérieur de la maison, arrivaient à un endroit relativement sécuritaire comparativement aux menaces auxquelles ils faisaient face dans le monde extérieur. Les rôles des femmes en tant que fournisseuses de soins, épouses et mères ont été relégués au foyer, ce qui a délimité encore plus les rôles traditionnels attribués aux femmes dans le domaine de la famille et la sphère privée (Boyd, 2016, p. 13). Selon Boyd (2016), les hommes cherchaient à protéger la sphère privée, sur laquelle ils avaient le contrôle, de la sphère publique. Même si l’espace privé était relativement sécuritaire pour les hommes, il pouvait être dangereux pour les femmes et les enfants et peut l’être encore à l’heure actuelle. Boyd (2016) affirme que cela a entraîné l’échec des lois visant initialement à protéger le public, puisqu’elles n’ont pas pu protéger les personnes vivant principalement dans les sphères privées.
Par exemple, les premières lois encourageaient le châtiment corporel des femmes et des enfants « derrière le voile » de la vie publique (Stedman, 1917). En vertu de la common law, les hommes pouvaient « réprimander » leur épouse ou lui infliger des « corrections mineures » comme ils le feraient pour leurs enfants, pourvu que le bâton utilisé pour ce faire ne dépasse pas la largeur du pouce de l’agresseur (Stedman, 1917). Cette orientation législative est ensuite devenue la « règle du pouce ». Les hommes ont également reçu l’ordre de réprimander leur épouse si sa conduite « l’exigeait » de manière à ce que la réprimande « ne cause pas de lésions corporelles graves ni de blessures permanentes » (p. 243). Stedman ajoute que, en plus d’être le « devoir » de l’époux dans les rapports avec sa famille, il était important qu’il le fasse, selon une décision antérieure du chancelier Kent aux États-Unis, pour « […] "dissimuler les interactions entre l’homme et la femme", l’idée étant qu’un léger châtiment sain, permettant à "la femme de se comporter" et étant administré en privé, causerait moins de bruit et de scandale que la publicité d’un procès au tribunal » (p. 243). La vie privée des hommes, et donc leurs expériences auprès des femmes, devait rester dans le domaine privé.
Dans un autre exemple, avant les modifications législatives introduites au Canada en 1983, les maris ayant eu des rapports sexuels forcés avec leur femme ne pouvaient pas être accusés de viol. On supposait que l’accès sexuel des hommes mariés à leur femme était absolu, c’est-à-dire essentiellement complet, ce qui comprenait le viol et d’autres formes d’agression sexuelle (Hinch, 1988). Dans les deux exemples de pratique juridique patriarcale mentionnés ci‑dessus, il n’y avait pas de privilège réciproque pour les femmes. L’influence persistante de ces racines patriarcales dans la common law se poursuit, compte tenu du fait que les sphères privées, en grande partie, ne sont pas à l’abri des regards du public. Il est suggéré dans le présent document que les lois et la théorie criminologique visant à expliquer la violence publique soient appliquées « à l’intérieur », ou derrière le voile, pour expliquer les formes privées de violence.
Les théories criminologiques, qui découlent de ces mêmes racines, fondent leur compréhension et leur explication de l’activité criminelle sur la délinquance masculine et la criminalité de rue en public, où les jeunes hommes victimisent d’autres hommes (Naffine, 1997). Par conséquent, nos façons d’envisager la criminalité et ses causes ne tiennent pas compte de l’expérience des victimes de violence en milieu privé, qui sont en grande partie des femmes et des enfants. On soutient qu’un système de justice pénale fondé sur ces hypothèses profondément ancrées au sujet de la nature des crimes et de la criminalité est mal outillé pour traiter des crimes commis dans la sphère privée. L’endroit où l’activité criminelle se produit doit être pris en considération, compte tenu des tendances sexospécifiques de l’espace en question. Il y a de fortes corrélations entre l’engagement social et les activités criminelles, la relation entre le délinquant et la victime et l’endroit où se déroulent les activités criminelles. Ceux qui entretiennent des relations plus étroites partagent souvent un espace plus intime.
Au cœur de cet argument se trouvent les concepts géographiques de lieu et d’espace, où l’on suppose que le lieu est un endroit défini, tandis que l’espace est plus perméable, temporaire et caractérisé par un flux de mouvement qui peut être modifié par les personnes qui le traversent (Harris, 2018). L’espace peut être divisé conceptuellement au-delà de la catégorisation binaire des espaces public et privé. Les géographes font également remarquer que l’espace peut être hybride, dans une forme de continuum, passant des lieux privés aux lieux semi-privés, semi‑publics et publics. Ils reconnaissent que l’endroit où nous nous trouvons dans l’espace peut avoir une incidence importante sur notre comportement (Pain, 1991). De plus, des géographes féministes ont souligné que le lieu et l’espace sont sexospécifiques, souvent imprégnés de sens, d’inégalités enracinées, de structures de pouvoir social et, dans le cas de la violence privée, de marqueurs de violence (Harris, 2016, 2018). Étant donné que notre système de justice pénale et nos explications du comportement criminel reposent en grande partie sur l’activité criminelle dans les espaces publics, les questions liées à la prévention et à la détection de la criminalité, à l’arrestation des délinquants et à leur extraction du domicile deviennent de plus en plus complexes à mesure que nous passons de la sphère publique à la sphère privée.
Prévalence de la victimisation dans les sphères privées
La victimisation privée est relativement courante. Selon Conroy, Burczycka et Savage (2019), 60 651 enfants et adolescents (âgés de 17 ans et moins) ont été victimes d’actes de violence déclarés par la police au Canada en 2018. Les filles de ce groupe étaient plus susceptibles d’être victimisées (57 %) que les garçons (43 %). Selon la grande majorité de ces rapports, neuf enfants et jeunes sur dix étaient victimisés dans des résidences privées (filles = 91 %; garçons = 90 %). Les filles et les garçons étaient beaucoup plus susceptibles de subir de la violence familiale lorsqu’ils étaient âgés de moins de cinq ans (filles = 71 %; garçons 72 %) et entre 6 et 11 ans (filles = 58 %; garçons = 50 %). La force physique a été déterminée comme l’arme principale utilisée dans les trois quarts (75 %) des cas de ce groupe signalés à la police. Ce qui est troublant, c’est que, dans plus d’un sixième (15 %) des cas, des armes ont servi à commettre les voies de fait. Alors que les taux d’agressions physiques étaient semblables chez les enfants et jeunes de sexe féminin et masculin (143 et 148 par 100 000 habitants), le taux d’infractions sexuelles était près de cinq fois supérieur chez les victimes de sexe féminin que chez les victimes de sexe masculin (149 et 32 par 100 000 habitants), ce qui démontre que les taux d’agressions sexuelles chez les enfants et jeunes de sexe féminin étaient semblables aux taux d’agressions physiques pour tous les enfants et jeunes.
Les infractions sexuelles étaient moins susceptibles d’être classées (47 %) que les agressions physiques (31 %) ou les autres infractions avec violence ou menace de violence (39 %). Les enfants et les jeunes étaient également plus à risque d’être assassinés par des membres de la famille (n=285) que par d’autres personnes (n=208), ceux âgés de moins de cinq ans (57 %) comptant pour la majorité de ces décès. Il importe de souligner que 93 % des victimes de violence physique et/ou sexuelle pendant l’enfance n’ont pas signalé les mauvais traitements à la police ni aux services de protection de l’enfance avant d’avoir 15 ans. La majorité des victimes (67 %) n’ont parlé à personne, y compris des amis ou des membres de leur famille, de la violence qu’elles subissaient. Tant chez les filles (75 %) que chez les garçons (73 %), les jeunes victimes de violence privée étaient plus susceptibles de partager une résidence avec leur délinquant. Les rapports de police indiquaient également que le tiers (33 %) des filles et 29 % des garçons âgés de 17 ans et moins avaient été identifiés comme ayant été victimisés par un membre de leur famille.
La violence entre partenaires intimes (VPI) représentait un quart (25 %; Sinha, 2011) à près du tiers (30 %; Conroy, Burczycka et Savage, 2019) des crimes violents signalés à la police, ces appels constituant une grande partie du nombre total d’appels faits aux services de police canadiens. Dans près des quatre cinquièmes de ces appels (79 %), les femmes âgées de 15 à 89 ans ont été identifiées comme victimes et, parmi toutes les formes de violence signalées à la police par les femmes, près de la moitié (45 %) était des cas de VPI. L’établissement de ces rapports repose fortement sur des signes physiques de violence, comme des indications de recours à la force physique ou la présence d’une arme à feu à l’arrivée des policiers sur les lieux. La violence entre partenaires intimes, que ce soit dans le cadre de fréquentations ou d’une relation à plus long terme, demeure la menace la plus importante de violence pour les femmes. La majorité des victimes de VPI (87 %) ont été agressées par leur conjoint; la moitié (50 %) des victimes dans le cadre d’appels de service liés à des cas de VPI vivaient dans la même résidence au moment de l’agression et, pour près de cinq appels de service sur six liés à des cas de VPI, une résidence privée était le lieu où la victimisation avait eu lieu. Pour la majorité (60 %) des homicides conjugaux commis au cours des 10 années ayant suivi 2008, il y avait des antécédents connus de violence familiale. Les femmes étaient plus de cinq fois plus susceptibles d’être tuées à la suite d’interactions de VPI (femmes = 0,5/100 000; hommes = 0,1/100 000) que les hommes et 2,5 fois plus susceptibles d’être victimes d’une tentative d’homicide par leur conjoint (femmes = 0,5/100 000; hommes = 0,2/100 000). De tous les homicides commis contre des femmes en 2018 (N = 169), 44 % étaient le résultat direct de VPI, comparativement à seulement 6,6 % (n = 319) chez les hommes. Les femmes sont plus susceptibles d’être tuées par un partenaire intime, tandis que les hommes sont plus susceptibles d’être tués par une connaissance ou un étranger (Roy et Marcellus, 2019).
Selon Stark (2007), une analyse des appels de service à la police du Connecticut a révélé que « toutes les femmes qui demandaient une ordonnance de protection avaient appelé la police au moins une fois et le tiers d’entre elles l’avaient fait de 5 à 10 fois » (p. 61). Les données de la police montraient que les agressions entre conjoints/partenaires avaient été signalées dans au moins trois cas sur quatre où une telle ordonnance avait été signifiée, dans la majorité des cas souvent de façon répétée. Stark a également souligné que, selon une étude classique menée dans les villes américaines de Kansas City et de Detroit, la police avait répondu à un appel de « troubles domestiques au moins une fois dans 90 % des ménages où un homicide ou des voies de fait graves ont été commis et cinq fois ou plus dans 50 % des cas » (p. 92-93). Enfin, Stark (2007, p. 93) attire l’attention sur une étude canadienne antérieure (Jaffe et Burris, 1982) qui « a révélé que les femmes qui ont accusé leur mari de voies de fait avaient déjà subi en moyenne 35 agressions ». Conroy, Burczycka et Savage (2019) appuient cette conclusion, soulignant que 70 % des cas de VPI déclarés dans le cadre d’enquêtes à grande échelle menées par le gouvernement canadien n’ont jamais été signalés à la police. Le risque de préjudice ou de blessures graves augmente lorsque la victime tente de se séparer de son agresseur (Ornstein et Rickne, 2013). Sinha (2011) montre que 45 % des meurtres-suicides perpétrés par des hommes de 2001 à 2011 avaient mené au décès de l’épouse.
De même, Walby et Towers (2018, p. 17) ont analysé les rapports de cas de VPI répétés et ont observé que « […] plus de 80 % (83 %) des victimes à répétition (plus de 10 crimes) sont des femmes » et que « [p]rès de la moitié (42 %) des victimes signalent plus d’un crime de violence familiale au cours d’une période de 12 mois et 85 % des crimes de violence familiale sont des événements en série » (p. 18). Au sein du système de justice pénale, dans le cadre de la majorité de ces crimes, l’accusé n’est pas identifié et, par conséquent, un nombre important d’incidents ne sont pas détectés, car la victime est incapable ou refuse de déposer une plainte contre son agresseur auprès de la police. On soutient que les lois visant à lutter contre la violence publique et la criminalité de rue ne permettent pas de bien traiter les crimes commis en milieu privé, où les femmes et les enfants ont tendance à être ciblés. Bien que certaines infrastructures sociales aient été mises en place place (par exemple : des campagnes de sensibilisation du public sur la violence à l'égard des femmes, des systèmes de refuges, des programmes éducatifs, la jurisprudence et, plus récemment, des politiques d'emploi) pour protéger les victimes de violence privée, en grande partie en raison des mouvements de défense des droits civils et des droits des femmes, qui peuvent changer les perceptions à l’égard de la violence privée, cela a eu peu d’effet sur le contrôle coercitif et n’offre pas vraiment de protection à long terme pour les victimes de violence privée (Stark, 2007).
En ce qui concerne les crimes contre les aînés, souvent négligés lorsqu’il est question de violence privée, Conroy, Burczycka et Savage (2019) soulignent que, bien que les hommes soient légèrement plus susceptibles de déclarer avoir été victimisés à la police (hommes = 55 %; femmes = 45 %), les femmes sont beaucoup plus susceptibles de signaler que leur agresseur était un membre de la famille (43 %), comparativement aux hommes (25 %). Environ neuf victimes âgées sur dix qui ont été victimisées par un membre de la famille (femmes = 92 %; hommes = 88 %) l’ont été dans une résidence. Un peu plus de femmes (62 %) que d’hommes (58 %) ont déclaré cohabiter avec l’agresseur. La force physique a été déterminée comme méthode d’agression par les hommes et les femmes dans près des deux tiers (63 %) des cas signalés à la police, le nombre de femmes (65 %) ayant déclaré une telle méthode étant légèrement supérieur à celui des hommes (60 %). Dans le cas de la violence commise en milieu privé, le signalement de la victimisation est complexifié par bon nombre des mêmes problèmes qui nuisent à d’autres groupes de victimes dans des espaces privés (p. ex. dépendance, peur, embarras, etc.), ce qui donne à penser que les cas de violence privée contre les aînés sont considérablement sous‑déclarés.
En somme, les femmes et les filles sont plus susceptibles d’être victimisées et victimisées de nouveau par une personne qu’elles connaissent, dans une résidence privée, et leurs délinquants sont plus susceptibles d’être des membres de la famille, comparativement aux hommes. Le délinquant prépare ses victimes de violence privée pour avoir accès à long terme à une cible en particulier ou à un petit groupe de victimes viables (Dietz, 2018; Farrell, Phillips et Pease, 1995). Les victimes apprennent à s’adapter au danger et ignorent les indices dangereux (Bancroft, 2002). Si la police n’est pas appelée dès les premiers incidents d’infraction criminelle, que la victime choisit de ne pas intenter de poursuite ou qu’elle décide de ne pas se présenter au tribunal, alors la violence est susceptible de se poursuivre (Ventura et Davis, 2005). Le système résiste à l’idée de reconnaître la gravité de la récidive contre une seule victime en milieu privé, préférant plutôt concentrer l’attention et les ressources sur les récidivistes qui font de multiples victimes dans des espaces publics.
Réponses à la violence privée dans le domaine patriarcal/public
La prévention de la criminalité et les options juridiques actuelles reposent depuis toujours sur des structures juridiques patriarcales et des théories de la criminalité axées sur le comportement délinquant des hommes et des garçons en public, respectivement. Les droits patriarcaux, qui considéraient les femmes et les enfants comme des biens, permettaient aux hommes de commettre des actes de brutalité contre des membres de leur propre famille, ces actes étant considérés comme non criminels (Stedman, 1917). Les crimes privés ne sont donc pas traités, car les lois ne tiennent pas compte de la dynamique de ces crimes, commis en grande partie par des hommes contre leur famille. L’incapacité du système de justice pénale à protéger les victimes de violence dans la sphère privée renforce la discrimination patriarcale contre les victimes de violence privée.
Les personnes qui commettent des actes de violence privée ne sont souvent pas considérées comme une menace publique, comme en témoigne le traitement traditionnel des cas de VPI où les hommes qui battent des femmes sont souvent invités à quitter le domicile pendant un certain temps, ou se voient imposer une amende, mais sont rarement accusés. En vertu de la loi, la pratique juridique est fondée sur des données probantes, axée historiquement sur les crimes qui ont lieu dans des espaces publics, et les juges et/ou les jurys se voient montrer des objets physiques pour prouver hors de tout doute que le délinquant a effectivement commis les crimes contre la victime. Les éléments de preuve les plus clairs se trouvent sous forme de « preuves tangibles », ce qui comprend, sans toutefois s’y limiter, des lettres documentées, des captures d’écran, des témoignages, des enregistrements de violence ou de menaces de violence et, ce qui constitue souvent les éléments de preuve les plus convaincants, des documents détaillés sur les blessures subies à la suite d’actes de violence. Les formes discrètes de violence, y compris le recours à des tactiques de violence coercitive, ne sont pas recueillies dans ces rapports de façon systématique puisqu’elles ne s’accompagnent pas de « preuves tangibles » (Gill et Aspinall, 2020).
Lorsqu’il y a violence, ce que Stedman (1917) a décrit comme étant derrière le voile dans un contexte privé, ce genre d’exigence concernant des preuves tangibles devient difficile à respecter. Dans bien des cas, la victime est souvent le seul témoin de l’acte criminel. Si d’autres personnes sont présentes en milieu privé, ces autres témoins et/ou victimes peuvent avoir des liens avec le délinquant et/ou sont à la charge de ce dernier. Cela complique les recours traditionnels, comme l’inculpation de l’accusé et/ou l’extraction du délinquant du domicile, qui sont plus faciles à appliquer lorsque la violence se produit en public et que la victime et le délinquant ne se connaissent pas vraiment et ne dépendent pas l’un de l’autre de quelque façon que ce soit. Les systèmes de justice pénale peuvent être limités ou incapables de tenir compte de la réalité des crimes privés dans les relations familiales. En raison de l’accès répété à la victime dans un environnement contrôlé, sans le regard vigilant du public, des tactiques plus discrètes sont souvent utilisées pour contrôler la victime, comme la violence psychologique, l’isolement, l’intimidation, l’utilisation des enfants, les comportements menaçants et coercitifs, les insultes, la destruction psychologique, le blâme de la victime pour les mauvais traitements qu’elle subit et le contrôle et/ou le désengagement des finances (Pence et Paymar, 1993), tactiques aussi connues sous le nom de contrôle coercitif (Gill et Aspinall, 2020; Stark, 2007).
Pour compliquer la réponse du système de justice pénale, ce système fondé sur des données probantes, dont les origines sont historiques, patriarcales et culturelles, éclaire le pouvoir discrétionnaire de la police sur les lieux. Lorsque la victime finit par avoir le courage d’appeler à l’aide, sachant que cela pourrait très bien l’exposer à un danger accru (Ornstein et Rickne, 2013), les policiers arrivent et utilisent des protocoles normalisés pour trouver des éléments de preuve matérielle et des témoins autres que la victime. Ces policiers sont les responsables du système de justice pénale qui cherchent des clés pour permettre à ceux qui y travaillent de rendre justice. Autrement dit, il se peut que les policiers ne soient pas conscients des tactiques les plus courantes, discrètes et coercitives utilisées par le délinquant. On fait valoir dans le présent document que, même si les policiers soupçonnent le recours à des tactiques de contrôle coercitif, ils ne disposent pas d’outils législatifs efficaces pour porter des accusations. Les options en matière d’accusation dont ils disposent ne sont pas explorées, car il faut trouver des preuves tangibles (témoins, lésions corporelles, autres formes d’éléments de preuve documentés, etc.) pour appuyer ces accusations afin que la Couronne puisse intenter des poursuites.
À titre d’exemple, Douglas (2012), à l’aide d’entrevues qualitatives semi-structurées menées auprès de femmes qui avaient été victimes de VPI et qui avaient appelé la police, a souligné que certaines femmes de l’étude avaient déclaré que, après une agression familiale, certains policiers sur les lieux n’avaient pas tenu compte de la VPI, sauf s’il s’agissait d’une agression physique. L’une des répondantes a affirmé ce qui suit : « [L’]agent de police] m’a aussi dit que mon agresseur ne m’avait rien fait en quelque sorte, n’est-ce pas? Ce ne sont que des menaces » (Douglas, 2012, p. 125). Une autre répondante a déclaré : « Ça m’a aidée d’avoir eu un œil au beurre noir… et des marques d’étranglement et tout le reste » (Douglas, 2012, p. 127). Cette étude précise que la majorité des expériences des femmes relatives à la VPI, qui sont de nature coercitive (Gill et Aspinall, 2020; Stark 2007), sont souvent considérées comme sans conséquence en vertu de la loi. Cela est réitéré dans l’étude menée par Douglas (2012); en effet, une des personnes interviewées a affirmé que les policiers avaient présumé que l’infraction de violence familiale serait impossible à prouver parce qu’il n’y avait pas de blessures physiques, de sorte qu’ils n’ont pas pris la peine de recueillir des éléments de preuve sur les lieux. En ce qui concerne le système judiciaire, une des personnes interviewées a déclaré que le juge dans son affaire avait prétendu que l’infraction commise contre elle n’était que le résultat de deux parties qui ne savaient pas comment communiquer. Cet exemple d’opinion judiciaire illustre clairement comment le système judiciaire peut repousser les affaires de violence familiale dans la sphère privée, ce qui laisse entendre que l’agression en milieu privé constitue une affaire personnelle. Bon nombre de femmes ayant participé à cette étude ont également fait remarquer que, si la violence dont elles ont été victimes avait plutôt été le fait d’un étranger, le délinquant serait en prison.
Stark (2007) décrit de nombreux aspects différents de la violence faite aux femmes en mettant particulièrement l’accent sur le contrôle coercitif. Stark (2007, p. 5) observe que les hommes parviennent à dominer la sphère privée, et en particulier les femmes, en « intégrant la violence physique répétée à trois tactiques tout aussi importantes, soit l’intimidation, l’isolement et le contrôle ». Il parle de l’emprisonnement des femmes à la maison et dans leur vie personnelle en ces termes :
Il est difficile à discerner parce que bon nombre des droits qu’il viole sont si fondamentaux – ils font partie des aspects tenus pour acquis de la vie quotidienne que nous menons en tant qu’adultes, ancrés dans les comportements féminins qui sont limités par leur application normative aux femmes – que leur violation passe en grande partie inaperçue […] certains des droits que les agresseurs retirent aux femmes sont déjà protégés dans la sphère publique, comme le droit à l’intégrité physique et à la propriété. Dans ces cas-là, la loi est contestée pour étendre les protections à la vie personnelle (Stark, 2007, p. 15).
Il discute ensuite des nombreux préjudices liés au contrôle coercitif qui sont invisibles en vertu de la loi, ce qui prouve davantage que le parti pris à l’égard de la violence publique, appliqué aux milieux privés, va encore plus loin dans le système de justice pénale et les tribunaux.
Murray et Powell (2009), en soulignant que les schémas de victimisation des femmes et des hommes s’appliquent principalement dans la sphère privée et dans la sphère publique, respectivement, donnent des exemples de changements apportés aux politiques en ce qui a trait à la violence familiale en Australie au cours des 20 dernières années. Les auteures se sont préoccupées du langage et de la façon dont la violence familiale est décrite dans les politiques gouvernementales et les croyances sociales. À l’instar des mouvements féministes et liés aux refuges aux États-Unis (Stark, 2007) et au Canada dans les années 1960 et 1970, en Australie, pendant les années 1980, les expériences de violence familiale n’ont été révélées que par les femmes qui ont cherché refuge contre leur partenaire intime et « […] étaient largement considérées comme une affaire privée et individuelle, souvent imputée à la victime » (Murray et Powell, 2009, p. 537). Ce n’est qu’à la fin des années 1990 que la littérature sur le problème de la violence familiale en Australie a été rendue publique. Les auteures font remarquer que les mouvements et les activités féministes qui ont commencé dans les années 1970 ont été à l’origine d’une grande partie des changements entourant la politique sur la violence familiale en Australie. Dans leurs arguments, elles soulignent l’importance du langage et la façon dont il doit être généré et dont il doit refléter la nature de la violence dans les sphères privées. Le langage, soutiennent-elles, constitue également un aspect important de la discussion, car il peut avoir un effet positif ou négatif sur la façon dont ce type de violence dans la sphère privée est perçu par les décideurs publics.
Hessick et Hessick (2011) discutent de l’idée selon laquelle les délinquants qui ne sont pas étrangers à la victime ou qui commettent des actes de violence familiale pourraient être perçus comme moins à risque que les délinquants inconnus de la victime par le système de justice pénale, car on suppose à tort que les délinquants commettant des actes de violence familiale représentent une menace minimale à l’extérieur de la relation particulière dans laquelle la violence a eu lieu. Il s’ensuit que, dans le cadre des enquêtes sur le cautionnement et des audiences de détermination de la peine, de probation et de libération conditionnelle, le risque de récidive des délinquants peut être considéré comme moindre, car la récidive a toujours été liée au risque pour le public. L’hypothèse sous-jacente est donc la suivante : s’il y a un risque touchant uniquement un petit groupe de personnes, cela est en quelque sorte moins dangereux pour le public. Cette considération du risque pour le public ne tient pas compte du nombre de personnes qui sont touchées par cette violence, des répercussions sur le développement des enfants et des familles ni du fait que la violence privée peut se transposer dans l’espace public. Par conséquent, le fait de reconnaître qu’un endroit précis est associé à des « antécédents de violence » ne permet pas d’attribuer la responsabilité de cette violence au délinquant. Ce terme plus neutre met plutôt en lumière la nature sexospécifique des actes de violence (Harris, 2016) et laisse entendre que les deux parties sont également responsables de ces appels de service répétés. Dans le présent document, on soutient que ces hypothèses peuvent avoir un effet subséquent sur la détermination de la peine.
Dans le cadre de la détermination de la peine, les cas de violence privée sont susceptibles d’être perçus comme étant moins graves et, par conséquent, comme nécessitant des peines moins lourdes. Hortsman, Bond et Eriksson (2019) ont examiné les perceptions du public en ce qui a trait à la gravité de la peine, au moyen de deux scénarios presque identiques, soit un cas de violence familiale (où la victime et le délinquant étaient des partenaires intimes) et un cas de violence non familiale (où les parties ne se connaissaient pas). Les répondants étaient en faveur d’une peine plus lourde pour le cas de violence non familiale, ce qui donne à penser que la relation entre la victime et le délinquant joue un rôle crucial dans la sévérité de la peine. Dans cette étude, « un répondant sur cinq était d’accord pour dire que la violence familiale pourrait être excusée si l’agresseur devenait en colère au point de perdre le contrôle ou qu’il regrettait son comportement » (Hortsman, Bond et Eriksson, 2019, p. 9). En ce qui concerne la détermination de la peine, les résultats de l’étude montrent qu’une proportion plus élevée de participants croyaient également que l’emprisonnement était nécessaire dans le scénario de violence non familiale. Cette étude laisse entendre que le public considère que les cas de violence non familiale méritent une peine plus lourde que les cas de violence familiale. Ces perceptions, à leur tour, peuvent influer sur les décisions prises par les membres du système de justice pénale (policiers, juristes, avocats, etc.) concernant le traitement des cas de violence en milieu privé et la détermination de la peine connexe.
Risque de récidive et outils d’évaluation du risque
Bien que l’on s’inquiète vivement du fait que les jeunes hommes qui adoptent des comportements délinquants dans la sphère publique deviennent des récidivistes, la même préoccupation ne semble pas s’étendre à ceux qui risquent de devenir des récidivistes derrière des portes closes. Selon un certain nombre d’outils d’évaluation du risque (p. ex. ERVFO : Évaluation du risque de violence familiale en Ontario; ERVC : Évaluation du risque de violence conjugale) utilisés par la police, dans le cadre des appels de service relatifs à la violence familiale et à la violence entre partenaires intimes, les « antécédents de violence » envers les partenaires et/ou les enfants et le « risque de récidive » constituent des facteurs clés pour déterminer le risque de victimisation supplémentaire de la cible (Northcott, 2012). Les outils d’évaluation du risque de violence familiale reconnaissent pleinement le risque de récidive pour cette catégorie de délinquants. Pourtant, on semble hésiter à considérer les délinquants à risque de récidive dans des lieux privés comme étant des récidivistes, ce qui suppose des exigences liées à des peines plus sévères, tant pour la dissuasion des délinquants en général que pour la dissuasion d’un délinquant en particulier. Les récidivistes peuvent avoir un casier judiciaire considérable comportant un certain nombre d’accusations variées (p. ex. possession de drogue, intrusion, voies de fait, y compris voies de fait dans un contexte familial) échelonnées sur de longues périodes. Ces délinquants sont une source de préoccupation pour le système de justice pénale, car ils peuvent entraîner des coûts importants pour ce dernier, sous forme de recours aux services de police, de comparutions répétées devant les tribunaux et, dans bien des cas, d’incarcérations répétées (Stewart, Wilton, Baglole et Miller, 2019). Le statut de récidiviste suppose un « risque élevé ». Les auteurs de cette étude soulignent que les personnes condamnées et incarcérées dans un établissement fédéral pour la première fois pour des infractions avec violence comme des voies de fait (41,3 %) affichaient certains des taux de récidive les plus élevés selon les dossiers du Système de gestion des délinquant(e)s (SGD) et du Centre d’information de la police canadienne (CIPC). Il importe de mentionner que les récidivistes sont plus susceptibles de provenir de foyers où les enfants ont été exposés à maintes reprises à la violence privée (Segeren, Fassaert, deWit, Grimbergen et Popma, 2020), tout comme les victimes à répétition (Conroy, Burczycka et Savage, 2019).
Le statut de récidiviste semble reposer sur l’hypothèse selon laquelle c’est le nombre de victimes touchées (préjugé du public) et non seulement le nombre d’incidents de criminalité qui est important. La définition de la récidive n’exige pas qu’il y ait de multiples victimes; elle ne concerne que des activités criminelles menées à répétition par un seul délinquant. Cette préoccupation relative à la récidive dans la sphère publique, et non dans la sphère privée, continue de mettre en danger les victimes de violence privée. Le nombre élevé d’appels à la police pour des situations de violence familiale en témoigne (Conroy, Burczycka et Savage, 2019; Sinha, 2011). Il semble y avoir un certain appui pour attribuer le statut de récidiviste à de nombreux auteurs de violence privée. Une étude menée par Johnson et Leone (2005) a porté sur deux formes de VPI : le terrorisme intime et la violence conjugale situationnelle. Le terrorisme intime se caractérise par le besoin pour le délinquant d’exercer un contrôle sur les victimes dans un contexte privé, souvent soutenu par une escalade de la violence. Cela se distingue du concept de violence conjugale situationnelle, qui est plus courant, n’est pas caractérisé par le besoin de contrôle de l’une ou l’autre des parties et est propre à la situation, sans escalade. Le concept de terrorisme intime, bien qu’il soit moins souvent mentionné que la violence conjugale situationnelle, donne à penser que les tendances à la récidive dans le domaine privé ont déjà été clairement cernées par le personnel de diverses disciplines.
Des mesures législatives, comme la loi de Clare en Saskatchewan (Saskatchewan, 2018), inspirées de mesures semblables prises au Royaume-Uni, en témoignent également. La loi a été créée en réponse au décès de Clare Wood, aux mains de son partenaire (Fitz-Gibbon et Walklate, 2017), qui avait des antécédents d’agression contre ses partenaires intimes, lesquels avaient été signalés à la police. La nouvelle loi repose sur l’hypothèse selon laquelle les victimes devraient avoir la capacité d’obtenir des renseignements qui indiquent si une personne qu’elles fréquentent a des antécédents de violence contre d’autres partenaires. Munies de cette information, les victimes potentielles et réelles peuvent faire des choix plus éclairés quant à la poursuite d’une relation où il y a un risque de violence. Bien que l’orientation de cette loi soit proactive, en ce sens qu’elle vise à aider les victimes à reconnaître les récidivistes qui ciblent les femmes et/ou les enfants dans un contexte privé, les critiques soutiennent qu’elle continue d’imposer aux victimes potentielles de VPI le fardeau de leur protection (Fitz-Gibbon et Walklate, 2017). Même si de nouveaux ajouts aux politiques et aux lois visent à aider les victimes, ils n’ont pas été élaborés de manière intuitive et ne sont pas fondés sur un modèle de victimisation privée. En continuant d’ajouter des éléments liés à la violence privée à un système principalement fondé sur la violence publique des hommes, nous appuyons ces hypothèses fondamentales à l’égard des systèmes publics comme étant plus pertinentes, malgré les preuves de plus en plus nombreuses laissant entendre que la violence privée devient la forme de violence la plus répandue (Conroy, Burczycka et Savage, 2019). Il se peut que, au fur et à mesure que des outils législatifs comme la loi de Clare deviennent disponibles, on les utilise pour blâmer la victime d’avoir poursuivi une relation tout en connaissant le passé du délinquant. Paradoxalement, les victimes peuvent aussi être pénalisées si elles n’utilisent pas la loi pour être mieux informées.
Répercussions
Le manque d’engagement envers les groupes vulnérables perpétue leur vulnérabilité. Les victimes de formes privées de violence font face à une discrimination systémique par le système de justice pénale, fondée sur des éléments de preuve solides concernant le manque de soutien offert à cette catégorie de victimes, ce qui donne à penser qu’un échec systémique touche les victimes de violence privée qui cherchent à obtenir justice. En l’absence de systèmes qui facilitent le signalement et la reconnaissance de la nature et de la substance des activités criminelles privées, les victimes d’actes criminels privés sont plus susceptibles de subir une victimisation répétée et des blessures graves. Les victimes sont souvent les seuls témoins de leur propre victimisation, entretenant une relation étroite avec le délinquant, et font l’objet d’un examen minutieux par le système de justice pénale, qui tente simultanément de maintenir et/ou de suspendre les droits du délinquant. La création de la Charte canadienne des droits des victimes représente une tentative, à l’échelle fédérale, d’assurer une représentation plus équilibrée des victimes qui aident le système de justice pénale à traiter les cas des délinquants (BOFVAC, 2021).
De plus, comme le système de justice pénale est fondé sur des pratiques axées sur des éléments de preuve matérielle qui ne tiennent pas compte des actes de violence coercitive (Gill et Aspinall, 2020) ni de la victimisation répétée et discrète, plutôt que manifeste, vécue au quotidien, les délinquants dans la sphère privée sont plus susceptibles de commettre des actes criminels à répétition sans être détectés. Les délinquants, sans l’aide de la victime attendue par le système de justice pénale, sont moins susceptibles d’être pénalisés par le système. Les peines imposées aux auteurs d’actes de violence privée, si ces derniers sont identifiés et que le cas est traité avec succès, peuvent être moins lourdes que celles imposées pour des actes semblables commis dans l’espace public (Hortsman, Bond et Eriksson, 2019). La diminution des signalements et de la détection donne à penser que les cibles sont moins susceptibles d’avoir accès aux services offerts aux victimes une fois qu’elles sont identifiées par le système de justice pénale. Les victimes de violence privée sont systématiquement mal servies malgré la dangerosité des crimes commis contre elles.
Si les hypothèses relatives aux préjugés du public ne sont pas contestées et/ou continuent d’être appliquées, les résultats continueront d’être fatals pour les victimes de violence privée. Cela continue d’accroître le risque de formes plus graves de victimisation de personnes ciblées dans la sphère privée par des récidivistes qui s’en sortent bien dans ces conditions. La violence privée peut devenir publique de toutes sortes de façons, y compris, mais sans s’y limiter, en milieu de travail (Wathen, MacQuarrie et MacGregor, 2015), et accroît la propension à la violence en exposant les enfants à des milieux et à des méthodes de violence privée (Conroy, Burczycka et Savage, 2019). Cela remet en question la notion de risque pour la sécurité publique, compte tenu des effets à court et à long terme de la victimisation répétée sur les cibles de violence privée.
Essentiellement, le système actuel perpétue peut-être la légitimation des victimes de violence privée, puisqu’il ne fournit pas de ressources adéquates dans le cadre d’un système qui n’a jamais été conçu pour répondre à leurs préoccupations. Sans reconnaissance des problèmes rencontrés au moment du signalement d’un crime privé (peur, manque de témoins, manque d’éléments de preuve matérielle, proximité sociale du délinquant, perte de revenu, espoir que le délinquant change, etc.), les victimes font face à des défis accrus pour répondre aux attentes en matière de partenariat au sein du système de justice pénale et aider le système à rendre justice.
Le fait d’accorder la priorité aux droits des délinquants plutôt qu’aux droits des victimes, dans le cadre du partenariat en matière de justice pénale, reflète les idéologies publiques et patriarcales qui assurent une plus grande protection à la catégorie de délinquants la plus courante, soit les hommes (Conroy, Burczycka et Savage, 2019). Le système de justice pénale devient un partenaire dans la discrimination des personnes les plus à risque de subir de la violence privée, où les tendances sexospécifiques de la victimisation et de la vulnérabilité sont claires. Les données probantes donnent à penser qu’il peut être efficace à long terme d’aborder la violence privée dans le cadre de vastes stratégies de prévention de la criminalité, car on a constaté que les actes de violence privée s’accompagnaient de propriétés criminogènes pour les enfants et les jeunes (Naughton, O’Donnell et Muldoon, 2015).
Conclusion
En ce qui concerne la violence dans les sphères privées, le présent document suggère que nous réexaminions le modèle consistant à « intégrer les victimes de violence privée » à un système de justice pénale conçu traditionnellement pour traiter les actes criminels des hommes et des jeunes hommes commis contre d’autres hommes, en dehors des milieux privés. Par le passé, ce même système a également permis l’agression de femmes et de filles, en milieu privé, par des chefs de famille de sexe masculin, dans le but d’éviter que des problèmes considérés comme des préoccupations privées ne fassent l’objet d’un examen public. La réactivité du système de justice pénale à l’égard des victimes de violence privée découle du même système que celui conçu pour répondre aux préoccupations en matière de sécurité publique, qui a été associé au risque de récidive et qui est lié à la menace que représente l’accusé pour la sécurité publique. En ne s’attaquant pas adéquatement aux menaces à la sécurité privée, le système de justice pénale actuel continue de mettre en danger les victimes de violence privée. En raison du schéma sexospécifique des crimes privés, ce manque de reconnaissance de la gravité de la récidive dans les lieux et les espaces privés s’inscrit dans le système plus vaste de discrimination systémique à laquelle font face les femmes et les filles. Nous devons reconnaître que, à tout le moins, la violence publique et la violence privée sont tout aussi dangereuses et nous devons réagir collectivement et équitablement aux menaces à la sécurité publique et privée.
Recommandations
- Adopter des termes comme « violence publique » et « violence privée », plutôt qu’une terminologie sexospécifique comme « violence familiale », pour décrire les expériences de victimisation privée afin de reconnaître les problèmes que ces actes posent pour les victimes.
- Reconnaître que les actes de violence sont sexospécifiques et que les femmes sont principalement ciblées dans les milieux privés, tandis que les hommes continuent de représenter la majorité des victimes à l’extérieur du foyer, et intégrer cette reconnaissance dans la politique en matière de justice pénale.
- Faire en sorte que tous les ordres de gouvernement qui se préoccupent des questions de criminalité et de victimisation reconnaissent que les actes de violence privée ont toujours été et continuent d’être traités inadéquatement par le système de justice pénale, qui se préoccupe davantage du risque pour le public.
- Poursuivre l’intégration des menaces à la sécurité privée des victimes dans les structures officielles qui sont depuis toujours axées sur l’évaluation du risque pour la sécurité publique.
- Insister sur le fait que le risque de récidive dans les milieux privés représente un risque pour le public, tant à long terme qu’à court terme.
- Encourager le système de justice pénale à attribuer le statut de récidiviste aux auteurs d’actes de violence privée lorsqu’il y a une preuve d’un ciblage répété d’une ou de plusieurs victimes dans un contexte privé.
Bibliographie
BANCROFT, L. (2002). “Why does he do that?” Inside the minds of angry and controlling men. New York, Berkley Books.
BOND, C. E. W. et S. JEFFRIES (2014). « Similar punishment? Comparing sentencing outcomes in domestic and non-domestic violence cases », British Journal of Criminology, vol. 54, p. 849-872, doi : 10.1093/bjc/azu034.
BOYD, S. (2016). Challenging the Public/Private Divide: Feminism, Law, and Public Policy. Toronto, Canada, University of Toronto Press. Consulté à l’adresse suivante : https://www-deslibrisca.uproxy.library.dc-uoit.ca/ID/417737 .
BUREAU DE L’OMBUDSMAN FÉDÉRAL DES VICTIMES D’ACTES CRIMINELS (BOFVAC, 2020). Rapport d’étape : La Charte canadienne des droits des victimes, Ottawa (Ontario), gouvernement du Canada. Consulté le 2 avril 2021 à l’adresse suivante : https://www.victimesdabord.gc.ca/res/pub/reccdv-prcvbr/40-061B%20OFOVC%20Progress%20Report_FR_web.pdf.
CONROY, S., BURCZYCKA, M. et L. SAVAGE (12 décembre 2019). « La violence familiale au Canada : un profil statistique, 2018 », Juristat, Ottawa, Canada, Statistique Canada. Consulté à l’adresse suivante : https://www150.statcan.gc.ca/n1/en/pub/85-002-x/2019001/article/00018-fra.pdf?st=8iGpc7-h.
DIETZ, P. (2018). « Grooming and seduction », Journal of Interpersonal Violence, vol. 33, no 1, p. 28-36, doi : 10.1077/0886260517742060.
DOUGLAS, H. (2012). « Battered women’s experiences of the criminal justice system: Decentring the law », Feminist Legal Studies, vol. 20, p. 121-134, doi : 10.1007/s10691-012-9201-1. Consulté à l’adresse suivante : https://link-springer-com.uproxy.library.dc-uoit.ca/article/10.1007/s10691-012-9201-1#citeas.
DOKKEDAHL, S., KRISTENSEN, T., MURPHY, S. et A. ELKLIT (2021). « The complex trauma of psychological violence: cross-sectional findings from a cohort of four Danish women shelters », European Journal of Psychotraumatology, vol. 12, no 1, 1863580–. https://doi.org/10.1080/20008198.2020.1863580
FARRELL, G., PHILLIPS, C. et K. PEASE (1995). « Like Taking Candy: Why does repeat victimization occur? », The British Journal of Criminology, vol. 35, no 3, p 384-399. doi : 10.1093/oxfordjournals.bjc.a048523.
FINKELHOR, D., WOLAK, J. et L. BERLINER (2001). « Police Reporting and Professional Help Seeking for Child Crime Victims: A Review », Child Maltreatment, vol. 6, no 1, p. 17-30. https://doi.org/10.1177/1077559501006001002.
FITZ-GIBBON, K. et S. WALKLATE (2017). « The efficacy of Clare’s Law in domestic violence law reform in England and Wales », Criminology & Criminal Justice, vol. 17, no 3, p. 284-300, doi : 10.1 177/1748895816671383.
GILBAR, O. et J. FORD (2020). « Indirect effects of PTSD and complex PTSD in the relationship of polyvictimization with intimate partner violence victimization and perpetration among men in mandated treatment », European Journal of Psychotraumatology, vol. 11, no 1, 1794653-794653. https://doi.org/10.1080/20008198.2020.1794653
GILL, C. et M. Aspinall (2020). Comprendre le contrôle coercitif dans le contexte de la violence entre partenaires intimes au Canada : Comment traiter la question par l’entremise du système de justice pénale? Document préparé pour le Bureau de l’ombudsman fédéral des victimes d’actes criminels, Ottawa, Canada, ministère de la Justice. Consulté le 1er avril 2021 à l’adresse suivante : https://www.victimesdabord.gc.ca/res/cor/CCC-UCC/Research%20Paper%20on%20Coercive%20Control%20-%20FR%20-%20April%2020.pdf.
HA, L. et R. CODE (2013). Une étude empirique sur la maltraitance des aînés : Un examen des dossiers de la Section contre la violence à l’égard des aînés, du Service de police d’Ottawa. Ottawa, Canada, ministère de la Justice. Consulté le 16 avril 2021 à l’adresse suivante : https://www.justice.gc.ca/fra/pr-rp/jp-cj/vf-fv/rr13_1/.
HARRIS, B. (2016). « Violent landscapes: A spatial study of family violence », dans A. Harkness, B. Harris et D. Baker (dir.), Locating Crime in Context and Place: Perspectives on Regional, Rural and Remote Australia, Federation Press, Annandale, Australie, p. 70-84.
HARRIS, B. (2018). « Spacelessness, spatiality and intimate partner violence: Technology-facilitated abuse, stalking and justice administration », dans K. Fitz-Gibbon, S. Walklate, J. McCulloch et J. M. Maher (dir.), Intimate Partner Violence, Risk and Security: Securing Women's Lives in a Global World, Routledge, Londres, p. 52-70.
HESSICK, C. B. et F. A. HESSICK (2011). « Recognizing Constitutional Rights at sentencing », California Law Review, vol. 99, no 1, p. 47-94.
HINCH, R. (1988). « Inconsistencies and contradictions in Canada's sexual assault law », Canadian Public Policy/Analyse de politiques, vol. 14, no 3, p. 282-294, doi : 10.2307/3550431.
HORTSMAN, N. J., BOND, C. E. W. et L. ERIKSSON (2019). « Sentencing domestic violence Offenders: A vignette study of public perceptions », Journal of Interpersonal Violence, vol. 124, p. 1-24, doi : 10.117710886260519888533.
JAFFE, P. et C. Burris (1982). Une réaction intégrée aux cas de femmes battues : modèle communautaire, Ottawa, Rapport de recherche du Solliciteur général du Canada.
JOHNSON, M.P. et J.M. LEONE (2005). « The differential effects of intimate terrorism and situational couple violence: Findings from the National Violence Against Women Survey », Journal of Family Issues, vol. 26, no 3, p. 322-349, doi : 10.1177/0192513X04270345.
MEYER, S. (2011). « Seeking help for intimate partner violence: Victims’ experiences when approaching the criminal justice system for IPV-related support and protection in an Australian jurisdiction », Feminist Criminology, vol. 6, no 4, p. 268-290. https://doi.org/10.1177/1557085111414860
MURRAY, S. et A. POWELL (2009). « "What’s the problem?" Australian public police constructions of domestic and family violence », Violence Against Women, vol. 15, no 5, p. 532-552, doi : 10.1177/1077801209331408.
NAFFINE, N. (1997). Feminism and Criminology, Cambridge (MA), Politity Press.
NORTHCOTT, M. (2012). Outils d'évaluation du risque de violence envers le partenaire intime : un examen, Ottawa (Ontario), Division de la recherche et de la statistique, ministère de la Justice du Canada.
NAUGHTON, C., O’DONNELL, A. et O. MULDOON (2015). « Family identification: a beneficial process for young adults who grow up in homes affected by parental intimate partner violence », Frontiers in Psychology, vol. 6, p. 1249-1249. https://doi.org/10.3389/fpsyg.2015.01249
ORNSTEIN, P. et J. RICKNE (2013). « When does intimate partner violence continue after separation? », Violence Against Women, vol. 19, no 5, p. 617-633. https://doi.org/10.1177/1077801213490560
PAIN, R. (1991). « Space, sexual violence and social control: integrating geographical and feminist analyses of women’s fear of crime », Progress in Human Geography, vol. 15, no 4, p. 415-431. https://doi.org/10.1177/030913259101500403
PENCE, E. et M. PAYMAR (1993). Education groups for men who batter: The Duluth Model, New York (NY), Springer.
ROY, J. et S. MARCELLUS (2019). « L’homicide au Canada, 2018 », Juristat, 4-35. Ottawa, Statistique Canada. Consulté à l’adresse suivante : https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/85-002-x/2019001/article/00016-fra.htm.
SASKATCHEWAN (2018). Bill No. 141: An Act respecting the Disclosure of Certain Information in accordance with an Interpersonal Violence Disclosure Protocol, troisième session, vingt-huitième législature, Saskatchewan, Canada, The Speaker of the Legislative Assembly of Saskatchewan. Consulté le 2 avril 2021 à l’adresse suivante : http://docs.legassembly.sk.ca/legdocs/Bills/28L3S/Bill28-141.pdf.
SEGEREN, M., FASSAERT, T., DE WIT, M., GRIMBERGEN, C. et A. POPMA (2020). « The relationship between adverse childhood experiences and self-sufficiency problems in early adulthood among violent offenders », Child Abuse & Neglect, vol. 101, p. 1-10, https://doi.org/10.1016/j.chiabu.2019.104354 .
SINHA, M. (2011). « La violence familiale au Canada : un profil statistique, 2011 », Ottawa, Statistique Canada, no 85-002-X, Juristat. Consulté le 2 avril 2021 à l’adresse suivante : https://www150.statcan.gc.ca/n1/fr/pub/85-002-x/2013001/article/11805-fra.pdf?st=cWgNxHW4
SMITH, J. et D. PATTON (2016). « Posttraumatic Stress Symptoms in Context: Examining Trauma Responses to Violent Exposures and Homicide Death Among Black Males in Urban Neighborhoods », American Journal of Orthopsychiatry, vol. 86, no 2, p. 212-223. https://doi.org/10.1037/ort0000101
SPENDER, D. (1980). Man Made Language, Melbourne, Australie, Routledge et Kegan Paul.
STEDMAN, B. (août 1917). « Right of husband to chastise his wife », Virginia Law Register, vol. 3, no 4, p. 241-248. Consulté le 25 août 2020 à l’adresse suivante : https://www.jstor.org/stable/pdf/1106112.pdf.
STARK, E. (2007). Coercive control: The entrapment of women in personal life, New York, Oxford University Press. Consulté à l’adresse suivante : https://books-scholarsportal-info.uproxy.library.dcuoit.ca/en/read?id=/ebooks/ebooks0/oxford/2011-05-05/1/115892#page=1
STEWART, L. A., WILTON, G., BAGLOLE, S. et R. MILLER (août 2019). Rapport de recherche : Étude exhaustive des taux de récidive chez les délinquants canadiens sous responsabilité fédérale (no R-426), Service correctionnel Canada, Ottawa (Ontario).
TERRY, A. (2016). « Reconceptualizing gender: A historical perspective from structure to process and intersectionality », Journal of Research in Gender Studies, vol. 6, no 2, p. 69-82.
VENTURA, L. A. et G. DAVIS (2005). « Domestic violence: Court case conviction and recidivism », Violence Against Women, vol. 11, no 2, p. 255-277, doi : 10.1177/1077801204271722.
VOCE, I. et H. BOXALL (2018). « Who reports domestic violence to police? A review of the evidence », Trends and Issues in Crime and Criminal Justice, vol. 559, p. 1-16.
WALBY, S et J. TOWERS (2018). « Untangling the concept of coercive control: Theorizing domestic violent crime », Criminology & Criminal Justice, vol. 18, no 1, p. 7-28, doi : 10.1177/1748895817743541.
WAMSER‐NANNEY, R. et B. VANDENBERG (2013). « Empirical Support for the Definition of a Complex Trauma Event in Children and Adolescents », Journal of Traumatic Stress, vol. 26, no 6, p. 671-678. https://doi.org/10.1002/jts.21857
WATHEN, C., MACQUARRIE, B. et J. MACGREGOR (2015). Can work be safe, when home isn’t?: Initial findings of a pan-Canadian survey on domestic violence and the workplace, Centre for Research & Education on Violence Against Women and Children, London (Ontario), Université Western.